lundi 24 octobre 2016

Put jelly on your shoulder

Lou Reed et le bréviaire des fantasmes




Si mon ami Philippe a raison et si le rock peut se définir comme le fait d'assumer ses perversions, plus précisément le plaisir que l'on en tire, alors le plus rock des groupes de rock est incontestablement le Velvet Underground.
Histoires de camés, de jeunes prostitué(e)s, travestis, ode aux opiacés ou aux bottes de cuir noir... La discographie du groupe est en soi et à la fois une encyclopédie des fantasmes, un guide des plaisirs interdits, une anthologie de tous les « ne faites pas ça chez vous les enfants ».

Une chanson, pour moi, résume parfaitement ce programme et en offre la plus admirable synthèse. Enregistrée initialement par le Velvet Underground au complet, il existe de Some kinda Love -chanson injustement méconnue- une version plutôt brute, délicieusement intitulée Closet Mix
Non seulement les paroles y sont sans ambigüité (« like a dirty french novel » écrit Lou Reed!) mais l'interprétation qu'il en fait est on peut plus claire... Délices du vice, la jouissance liée à la satisfaction de désirs peu avouables. Entre la pensée et l'acte, il y a un pas ("between thought and expression, lies a lifetime") qu'il franchit allègrement.
« Some kinds of love, the possibilities are endless, and for me to miss one would seem to be groundless ». Pas besoin de dessin ni, à fortiori, de vidéo clip.
C'est chaud, torride même, Lou Reed soupire, frissonne, miaule, feule, déploie toute sa gamme de mmmmh et de houuuuu... l'orgasme n'est pas loin... mais Lou tient la bride et revient à la charge.
« Put jelly on your shoulder... let us do what you fear most... »  je traduis la suite « ce qui te fait reculer et te met l'eau à la bouche ».
Comme le refrain de Gainsbourg, tout aussi rock dans l'écriture et l'attitude, et blasphématoire lorsqu'il liait le plaisir à la prière:
« Je t'en prie ne sois pas farouche, quand me vient l'eau à la bouche »

Le plaisir n'est jamais si grand que lorsqu'il est transgressif et cette transgression est maximale lorsqu'elle s'énonce innocemment: charge satanique d'une parole aux accents angéliques...
Je reviens une dernière fois à Lou Reed, au dernier couplet d'une de ses plus belles chansons d'amour (adultère forcément) Pale blue eyes:
« It was good what we did yesterday and I'd do it once again,
 The fact that you are married only proves you're my best friend... but it's truly, truly a sin. » 

C'est mal, mais c'est bon, faisons-le encore: credo du rock n' roll. 
Amen.

  

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