dimanche 22 janvier 2017

Un cycle de folie

La folie par l'image

Autoportrait de Gustave Courbet, "Le désespéré"

D’où vient ce mystérieux pouvoir qu’ont certaines images de nous subjuguer, de pénétrer notre subconscient et d’y étendre leurs racines, de s’y installer si bien qu’elles en deviennent des obsessions ? Peut-être parce qu’elles savent trouver en nous, au plus profond de nous, la résonnance la plus intime et donc la plus grande.
Dans mon propre imagier fantôme, les fous occupent une place importante. Certains sont des autoportraits d’artistes reconnus, d’autres des portraits peints ou photographiques de fous parfois sans autre identité que celle de leur démence (Monomanie, Epilepsie, Mélancolie…). Mais, même anonymes, et depuis longtemps disparus, leur présence captive le regard, tétanise la pensée et déclenche l’émotion. Parce qu’on lit sur leurs figures la détresse, la souffrance, l’égarement, parce qu’elles nous renvoient à nous-même et à un autre nous-mêmes, à cette terrible dissociation du moi qu’est l’aliénation.
De même que certains artistes ont pu trouver un exutoire, un réconfort ou une libération en se représentant dans des moments de crise (on pense à Van Gogh, à Artaud, au cri de Munch, à l’autoportrait que Courbet gardait auprès de lui), le premier souci des aliénistes lorsqu’ils ont commencé à s’intéresser aux fous comme à des malades susceptibles d’être soignés, a été de les dessiner ou de les photographier pendant leurs crises pour établir une classification de leurs troubles et tenter de rationnaliser l’irrationnel. Mais si dans le premier cas l’expression artistique pouvait permettre à celui qui se peignait de se réapproprier son image, dans le second cas cette volonté de représenter pour classer, exposer, prouver a mené à une seconde aliénation.
C’est ainsi qu’a débuté une période étrange durant laquelle l’histoire de la médecine mentale et celle de l’image se sont rapprochées, et qu’on a vu les aliénés devenir les modèles de médecins apprentis photographes ou de magnétiseurs prêts à faire d’eux les cobayes de toutes les expérimentations de l’époque, du cinématographe à l’hypnose, parfois dans de spectaculaires mises en scène.
Ces images sont captivantes, leur histoire l’est tout autant.
A suivre, Géricault et ses portraits d’aliénés.

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